Une épine au pied du PQ
Réunis en congrès à Montréal en avril 2011, les délégués du Parti québécois appuyaient massivement la proposition de Pierre Curzi visant à étendre l’application de la loi 101 dans les cégeps, une mesure qui, bien qu’elle circulait depuis longtemps dans les officines du PQ, avait toujours été rejetée.
C’est finalement la parution de l’Enquête du comportement linguistique des étudiants au collégial (ECLEC) menée par l’Institut de recherche sur le français en Amérique qui avait réussi à faire pencher la balance du côté de l’adhésion à cette proposition par la majorité des 1700 délégués, notamment par Bernard Landry et la chef du parti Pauline Marois.
L’ECLEC portait sur un échantillon de quelque 3200 collégiens provenant de cégeps de l’Île de Montréal, soit 1736 étudiants dans des cégeps français et 1494 dans des cégeps anglais. Les résultats les plus révélateurs mis de l’avant par les promoteurs de l’application de la Loi 101 au cégep étaient que seulement 40 % des étudiants allophones et 64 % des francophones fréquentant les cégeps anglais utilisent surtout le français dans les commerces, et que seulement 37 % des étudiants allophones et 60 % des francophones fréquentant ces cégeps qui travaillent en même temps utilisent davantage le français dans leur milieu de travail.
L’enquête démontrait également que moins de 5 % des allophones fréquentant les cégeps anglais parlait français à la maison, par rapport à 35 % chez les allophones fréquentant les cégeps français. De même, seulement 73 % des francophones fréquentant les cégeps anglais parlaient français à la maison par rapport à 99 % des francophones fréquentant les cégeps français.
Or, lorsqu’il a présenté le projet de loi 14 renforçant la Charte de la langue française, en décembre 2012, le gouvernement Marois avait expliqué que l’application de la loi 101 au réseau collégial avait été mise entre parenthèses parce qu’il était minoritaire.
Pourtant, en début de campagne électorale en 2014, Pauline Marois annonce qu’un prochain gouvernement péquiste, même majoritaire, ne cherchera pas à fermer la porte des établissements collégiaux anglophones aux francophones et aux allophones, alléguant qu’il n’était plus nécessaire de viser les cégeps concernant l’application de la loi 101 et que la plateforme électorale s’en tiendrait au projet de loi 14 tel qu’il a été rédigé.
Une mesure électoraliste partisane et laxiste qui vient ouvrir davantage une brèche importante déjà entaillée concernant l’anglicisation en milieu de travail, particulièrement béante sur l’île de Montréal.
Un déni face à un combat mené à bout de bras par Pierre Curzi pendant plusieurs années et qui a pourtant reçu l’aval des délégués au congrès de 2011 y compris de la chef du PQ Pauline Marois, qui contribue, par son revirement, à enfoncer une épine au pied du PQ en ce début de campagne électorale.
quebechebdo 9 mars 2014
vigile.net tribune libre 9 mars 2014 "Des cégeps anglicisent Montréal"