#DixPetitsNègres
Le roman policier d’Agatha Christie, Dix petits nègres, un best-seller mondial qui s’est vendu à plus de 100 millions d’exemplaires, change de nom, amputé du mot « nègre » dans sa version française, pour «ne pas blesser». Le nouveau titre français devient Ils étaient dix. Mais il ne s’agit pas seulement d’un changement de titre. Le mot « nègre », cité 74 fois dans la version originale du récit, n’apparaît plus du tout dans la nouvelle édition. Et, comble de paradoxe, c’est l’arrière-petit-fils de la romancière britannique, James Prichard, dirigeant de la société propriétaire des droits littéraires et médiatiques des œuvres d’Agatha Christie qui a révélé l’information à la radio RTL.
Parmi les nombreuses réactions provoquées sur les réseaux sociaux à la suite de l’annonce du changement de titre du roman d’Agatha Christie, je retiens celle du philosophe Raphaël Enthoven publiée sur son compte Twitter : « Il y a quelques mois encore, on était des milliers à rire de bon cœur des incultes qui s’indignaient de ce titre. Désormais, l’inculture triomphe et règne ».
Après Autant en emporte le vent, est-ce qu’on va retirer La vie est belle et La liste de Schindler des écrans pour éviter de choquer les juifs ? À partir de quand est-ce qu’un mot, parce qu’il est susceptible de vexer certains cœurs fragiles, doit disparaître complètement du vocabulaire ? Sur quelles bases doit-on taire un événement historique dont le souvenir heurte certains ?
Gommer une œuvre littéraire, ce n’est pas moins grave qu’effacer des portions d’un tableau de maître ou « photoshoper » des images d’événements historiques pour les rendre conformes à la version des vainqueurs. En 2020, est-ce vraiment le chemin dans lequel nous souhaitons nous aventurer ? Quelle tendance infantilisante que celle de toujours prendre tout le monde par la main de peur de blesser quelqu’un!
vigile.quebec tribune libre 30 août 2020
quebechebdo 31 août 2020