Au sujet de la « délicate question » de la francisation obligatoire des immigrants

Lors d’une conférence de presse tenue le 2 octobre 2012 portant sur la francisation des personnes immigrantes et des non-francophones et leur intégration à la société québécoise, la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles et ministre responsable de la Charte de la langue française, Diane De Courcy, a fait savoir en ces termes qu'elle accueille positivement les préoccupations exprimées par la Fédération autonome de l'enseignement et les organisations qui s’y sont exprimées : « Cette préoccupation rejoint mon mandat en immigration de même que celui relatif à la langue. La vitalité et la qualité du français, ce qui inclut la francisation des nouveaux arrivants, est clairement pour moi une priorité ».

Or, moins de deux mois plus tard, le gouvernement Marois refuse de dire s'il va ou non respecter son engagement visant à forcer des milliers d'immigrants allophones à apprendre la langue officielle du Québec. En effet, en entrevue à La Presse Canadienne, sa première depuis qu'elle est entrée en fonctions, la ministre De Courcy, a dit qu'il était trop tôt pour se prononcer sur cette délicate question tout en ajoutant qu’elle ne se fixait pas d'échéance pour y répondre. «Je ne suis pas encore à des mesures, à des dispositions. Je suis à des constats, a lancé la ministre. Il serait trop tôt pour vous dire que mon idée est faite.»

Le Québec accueille plus de 50 000 immigrants chaque année. Environ 12 000 d'entre eux ne peuvent dire un mot de français à leur arrivée en terre québécoise et, de ce nombre, près de 5000 ne s'inscriront à aucun cours de français. Et pourtant, quoi que la ministre De Courcy se dise consciente que le Québec échappe ainsi, année après année, quelque 40% des nouveaux arrivants non francophones et qu’elle se demande comment rejoindre ce pourcentage imposant, qui, pour diverses raisons, ne s'intègre pas à la majorité francophone, elle rétorque qu’elle « n’est pas rendue là » quand on lui demande quels moyens elle entend envisager pour corriger le tir.

Pourtant, en septembre 2012, la plateforme électorale du Parti québécois était très claire sur ce point, affirmant qu'un gouvernement Marois allait «rendre obligatoires les cours de francisation pour celles et ceux qui n'ont pas une connaissance fonctionnelle du français». Mais, que s’est-il passé depuis lors pour que le gouvernement traite la francisation obligatoire des immigrants de « question délicate » comme si le fait que les immigrants doivent se soumettre à l’apprentissage de la « langue officielle du Québec » ne devait pas être considéré comme une exigence qui découle de soi?

À mon sens, il serait inadmissible que la ministre de l’Immigration, confrontée à des contraintes quant à la capacité du Québec d’accueillir un nombre trop élevé d’immigrants à qui il peut offrir de l’emploi, mêle cette juridiction à celle qui lui incombe en tant que ministre responsable de la charte de la langue française en remettant en question la francisation obligatoire des immigrants indépendamment de leur nombre… ce sont là deux « chapeaux » avec lesquels Mme De Courcy devra apprendre à composer sans qu’ils ne subissent des contrecoups inopportuns l’un par rapport à l’autre.

vigile.net tribune libre 26 novembre 2012
quebechebdo 26 novembre 2012 

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