L’enseignement, une question de communication
D’entrée de jeu, j’aimerais apporter une précision sur mes intentions en rédigeant une telle lettre. D’abord, loin de moi l’idée de me prendre pour un enseignant qui détient la possession tranquille de la vérité. Bien au contraire, j’ai connu moi aussi mes épisodes d’incertitude.
Par ailleurs, durant toutes ces années, j’ai connu une pléiade d’enseignants tous de bonne foi et, pour la plupart, munis d’un bagage de connaissances amplement suffisant pour des élèves du secondaire. Or, malheureusement pour eux, ils se heurtaient souvent à un problème de communication avec les élèves, ce qui mettait de facto un frein à l’enseignement de leur savoir.
Capter l’attention des élèves
La façon d’aborder le début d’un cours tient beaucoup du moment de la journée où il se donne. Ou les élèves arrivent les idées ailleurs pour leur premier cours de la journée, ou ils ont pu décompresser entre deux cours en échangeant avec des amis, ou ils reviennent de leur période de dîner, ou ils débutent leur dernier cours de la journée plus fatigués et moins concentrés.
Après quelques mois d’essais plus ou moins efficaces lors de ma première année d’enseignement, et nonobstant le fait que certains enseignants alléguaient que je perdais un temps « précieux », j’ai vite compris qu’il était utopique de débuter le cours dès le son de la cloche. Aussi ai-pris vite l’habitude de créer le lien avec le groupe d’élèves assis devant moi, un lien qui jouait le rôle de canal de communication entre eux et moi.
La communication non-verbale
On est souvent porté à oublier que parfois certains silences en disent plus long qu’une intervention verbale. Ce n’est pas pour rien qu’un vieux proverbe nous ramène à l’idée que le silence est d’or et que la parole est d’argent.
Aussi ai-appris parfois, particulièrement à certaines périodes où je perdais l’attention des élèves, d’arrêter subitement de parler et d’aller m’asseoir tout bonnement à mon bureau en silence, ce qui suscitait un phénomène de déstabilisation de la part des élèves qui se demandaient ce qui se passait et quelle serait la suite. De mon côté, je les regardais droit dans les yeux sans dire un mot. Au bout de quelques minutes, le calme étant revenu, je me levais et je poursuivais mon cours dans le calme.
La main de fer dans un gant de velours
J’ai passé la grande majorité de ma carrière en troisième secondaire, donc en compagnie de jeunes de 14 ans, une période qualifiée de « crise de l’adolescence ». Toutefois, je dois admettre que je me suis toujours senti comme un poisson dans l’eau, notamment le jour où j’ai compris que ces adolescents quoique naturellement rébarbatifs eu égard aux règles de conduite à cet âge, avaient besoin d’un prof qui peut être rigide mais aussi faire preuve de souplesse à l’occasion.
C’est ce que j’appelle la main de fer dans un gant de velours, En d’autres termes, je gardais une attitude de fermeté tout en permettant aux jeunes le droit l’erreur. Pour employer une comparaison, le Christ est tombé trois fois sur le chemin qui l’a conduit au calvaire. Conséquemment, pourquoi ne permettrions-nous pas à un jeune une « chute » sans le « crucifier » sur-le-champ?
vigile.quebec tribune libre 11 avril 2023