Décrochage des futurs profs

4 septembre 2024

 

Les statistiques sont alarmantes, En pleine période de pénurie de main d’oeuvre en enseignement, jusqu’à un aspirant prof sur deux abandonne ses études en cours, une proportion qui est en hausse dans certaines universités.

Selon la doyenne de la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval, Anabelle Viau-Guay, «une des pistes d’explication, c’est la durée des études qui s’allonge chez nos étudiants notamment en raison de la conciliation travail-études. Parmi la plus récente cohorte d’étudiants en enseignement, 10% sont toujours inscrits à l’université six ans après le début de leur baccalauréat de quatre ans». Le taux de diplomation à l’Université Laval, tous programmes confondus, est de 64% comparativement à 79% il y a trois ans, et un scénario à peu près semblable ressort dans les autres universités du Québec.

Or quoique perçus de facto comme bénéfiques pour la formation des futurs enseignants, certains experts du réseau scolaire préconisent la rémunération des stages en enseignement, un facteur qui contribuerait, selon eux, à freiner le nombre d’abandons parmi les aspirants enseignants qui, pour plusieurs, doivent se dénicher un emploi à temps partiel pour payer l’épicerie.

En bref, l’attractivité et la rétention eu égard aux études menant à la carrière d’enseignant ont un prix. Primo, la durée du baccalauréat en sciences de l’éducation doit être réduite au minimum compte tenu que les cours de didactique n’abordent que les notions théoriques inhérentes à la profession d’enseignant. Et secundo, les stages, qui incarnent la facette pratique des notions didactiques, doivent être rémunérés, les étudiants étant confrontés aux mêmes tâches qu’un enseignant, notamment à la préparation et la prestation de cours en plus de la correction.

vigile.quebec tribune libre 3 septembre 2024
 

Le vouvoiement n’est pas la panacée à l’irrespect

1 septembre 2024

Avec le début des classes dans les écoles du Québec, il est une question qui revient sur toutes les lèvres comme un leitmotiv à chaque rentrée scolaire à savoir «devons-nous exiger le vouvoiement de la part des élèves envers le personnel enseignant?»

À cet effet, le vouvoiement a toujours été associé à une marque de respect envers la personne à qui on s’adresse, voire la panacée aux problèmes liés au manque de respect de certains élèves envers leurs enseignants, une assertion à laquelle je me rallie mais avec une certaine réserve.Tout d’abord, il m’apparaît primordial de faire une mise au point. À mes yeux, le respect ne s’exige pas par des «vous», il se gagne avec le temps. Je demeure convaincu que le respect ne s’impose pas de droit, mais qu’il s’acquiert dans une attitude respectueuse des personnes humaines que nous côtoyons, peu importe leur âge et leur statut. En termes clairs, l’enseignant gagnera le respect de ses élèves pour autant qu’il leur rend la pareille. Par ailleurs, il est utopique de croire qu’un professeur qui exige le vouvoiement gagnera de facto le respect de ses élèves.

J’ai toujours vouvoyé mes parents, mes enfants me tutoient et ma petite-fille tutoie ses grands-parents et cela dans un respect mutuel. Lorsque j’étais enseignant, la plupart de mes élèves me demandaient s’ils devaient me tutoyer ou me vouvoyer. Je leur répondais que je n’avais pas de préférence à cet égard pour autant que le respect s’établisse entre nous.

En bref, si nous fabulons sur l’effet magique du vouvoiement, nous risquons de mettre un cataplasme sur la solution au problème d’irrespect de certains jeunes car nous devons admettre qu’on peut manquer de respect envers quelqu’un même en le vouvoyant!

vigile.quebec tribune libre 29 août 2024

Lab-École ou restaurer des écoles?

30 août 2024

D’entrée de jeu, je voudrais dissiper toute ambiguïté sur les bienfaits pédagogiques du projet de Lab-École, abstraction faite du coût astronomique engendré par la construction d’un tel projet. À titre d’exemples, le Lab-École de Rimouski est estimé à 44,3 millions $ pour un bâtiment de 25 classes, et celui de Shefford à 37,1 M$, soit une facture moyenne de 2,3 M$ par classe. Par ailleurs, on apprend que le gouvernement Legault a pris la décision de mettre fin à ce projet.

D’un autre côté, c’est bien connu, plusieurs des écoles actuelles tombent en décrépitude sous le poids des années et ont rapidement besoin dune cure de rajeunissement, notamment sur l’étanchéité de la fenestration et l’absence d’un système d’air climatisé lors des canicules qui sont de plus en plus fréquentes sous l’influence des changements climatiques. C’est sans compter les murs défraîchis par le temps et les fissures qui font figure de locaux délabrés.

À cet effet, on se souviendra que François Legault a pris comme engagement de faire de l’éducation sa première priorité dès le début de son premier mandat, le délabrement des écoles québécoises faisant partie intégrante de cet engagement. Or le projet de Lab-École, malgré ses vertus avant-gardistes, ne touchent qu’une minorité d’élèves tandis que la restauration des écoles existantes améliorerait la qualité de vie de l’ensemble des élèves du Québec.

Enfin, je suis plutôt d’avis que les investissements eu égard au bien-être des élèves doivent être priorisés au profit de la qualité de vie de l’ensemble des jeunes du Québec plutôt que de privilégier une infime partie des élèves. C’est une simple question de gros bon sens!

vigile.quebec tribune libre 29 août 2024 "Investir dans le Lab-École ou la restauration des écoles"
Le Devoir 30 août 2024

 

C’est en enseignant qu’on apprend à enseigner

29 août 2024

Sans grande surprise, la pénurie d’enseignants refait surface en ce début d’année scolaire, attirant dans son sillon l’inquiétude des parents et des directions d’écoles qui n’ont d’autres choix que de se rabattre sur l’engagement d’enseignants non-qualifiés. Parmi eux, se retrouvent des bacheliers en français, en mathématiques, en géographie, en histoire, etc. En bref, des personnes compétentes dans leur domaine respectif mais qui manquent d’un atout essentiel, soit une formation en didactique.

Or, enseigner est un art qui s’acquiert, comme la plupart des professions, à travers les expériences vécues, en d’autres termes, par l’enseignement. Nonobstant les outils importants présentés aux bacheliers en sciences de l’éducation, l’apprentissage de la profession trouve aussi sa pertinence dans la prestation de cours adéquate sur le terrain.

Conséquemment, il m’apparaît essentiel que les enseignants non-qualifiés soient appuyés par des mentors qui pourront les initier progressivement aux rudiments de l’acte pédagogique, dont la gestion de classe, une variable primordiale sous-jacente à toute forme de communication des connaissances.

Sans vouloir dénigrer l’importance des cours de didactique, il n’en demeure pas moins qu’ils sont axés autour de notions théoriques qui font abstraction des situations concrètes que sont appelés à gérer les enseignants au quotidien. Dans cette foulée, le mentor joue un rôle capital, soit de présenter à l’enseignant non-qualifié les bases d’une saine gestion de groupe, Après tout, n’est-ce pas en enseignant qu’on apprend à enseigner?

vigile.quebec tribune libre 28 août 2024
Le Devoir 31 août 2024

L’étymologie à la défense de l’orthographe

27 août 2024

Dans la foulée de la nouvelle branche de la rubrique Point de vue, Point de langue, j’ai cru pertinent de remettre les pendules à l’heure eu égard à l’étymologie des mots, le déclencheur de ma réflexion émanant de l’article de Mireille Elchacar sous le titre Et si l’on dépassait les idées reçues sur l’orthographe?

Depuis des siècles, de nombreux projets de réformes de l’orthographe française ont été proposés dans le but, notamment, de simplifier la graphie des mots. Or, nonobstant l’intention louable de ces réformes orthographiques, on semble oublier que la très grande majorité des mots français tirent leur origine et, par conséquent leur racine du latin.

À en juger l’orthographe de certains mots que plusieurs qualifient d’inutilement compliqué, une tendance à la simplification entre directement en conflit avec l’étymologie des mots. Ainsi en est-il du chiffre «sept» qui conserve le «p» en français compte tenu de son origine latine «septem», et des adjectifs «innombrable» et «inopportun» qui pour l’un redouble le «n» sous l’effet de la proposition latine «in» et de la première lettre de la racine et pour l’autre, conserve la préposition «in» latine suivie de la racine commençant par une voyelle.

Selon Larousse, l’étymologie est la «science qui a pour objet la recherche de l'origine des mots d'une langue donnée, et la reconstitution de l'ascendance de ces mots.» En conséquence, l’étymologie va au-delà de l’origine des mots, elle reconstitue l’ascendance des mots, d’où la nécessité de reproduire fidèlement la graphie latine, à défaut de quoi le mot français se verra littéralement déraciné.

En terminant, je suis d’avis qu’une période d’étymologie par cycle soit intégrée au cours de français au premier cycle du secondaire dans le but de conscientiser les élèves sur les phénomènes orthographiques agissant sur les mots français et, de ce fait, les amener à démystifier ce que certains spécialistes qualifient à tort d’ orthographe «capricieuse».

vigile.quebec tribune libre 25 août 2024
Le Devoir 27 août 2024

Sur quelle planète vivez-vous, M. Caire?

23 août 2024

À chaque occasion où le ministre de la Cybersécurité et du Numérique et député de La Peltrie, Éric Caire, tient un point de presse, j’ai toujours la bizarre impression qu’il sort tout droit d’une boîte à surprises.

Ainsi en est-il de sa dernière rencontre avec la presse au cours de laquelle un journaliste lui a demandé où il imaginait le projet de troisième lien entre Québec et Lévis. «Ah, mon Dieu! Ben, le tracé a été fait, là, le corridor de centre-ville à centre-ville. On parle de… rue Lallemand, je pense. Non, c’est pas Lallemand. Sur la Rive-Sud, là, je ne me souviens plus. En tout cas, la recommandation est faite et je pense que l’idée, c’est d’aller de l’avant avec ça.»

Or on se rappellera qu’au moment où le gouvernement Legault, pour la première fois, avait annoncé la construction d’un tunnel sous-fluvial, Éric Caire avait mis son siège en jeu dans l’éventualité d’un rejet du projet, allant jusqu’à ajouter qu’il se battrait jusqu’à la dernière goutte de sang pour sa réalisation.

Dans cette foulée, force est de constater que les engagements formels de M. Caire envers le troisième lien manque pour le moins de «ferveur» compte tenu de son ignorance eu égard à l’endroit et au type de construction prévus en ce qui a trait au troisième lien. En conséquence, M. Caire, sur quelle planète vivez-vous?

Le Soleil (verson numérique) 23 août 2024
Le Devoir 24 août 2024
vigile.quebec tribune libre 25 août 2024

La carrière d’enseignant en mal d’amour

19 août 2024

Pour une deuxième année consécutive, des milliers d’élèves du Québec seront privés de professeurs qualifiés en début d’année scolaire, une situation catastrophique annoncée récemment par le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville.

On aura beau considérer toutes les hypothèses expliquant une telle pénurie dans le monde de l’enseignement, force est de constater que la carrière d’enseignant est en mal d’amour, en d’autres mots, qu’elle a perdu ses lettres de noblesse. Fini le temps où les étudiants en sciences de l’éducation se bousculaient pour avoir une place à l’université. Fini le temps où les candidats à un poste d’enseignant étaient confrontés à d’autres aspirants pour obtenir le poste tant convoité.

Mais que s’est-il donc passé pour qu’un tel engouement ne s’estompe aussi brutalement? À mon sens, la réponse à cette question est étroitement liée à la lourdeur de la tâche à laquelle sont soumis les enseignants d’aujourd’hui, notamment à la présence des étudiants à besoins particuliers au sein des groupes dits «réguliers». Tant et aussi longtemps que les enseignants ne recevront pas l’aide du personnel spécialisé pour les appuyer dans leur tâche, la gestion de classe occupera la majorité du temps des enseignants au détriment de la qualité de l’acte pédagogique.

Aujourd’hui, nos écoles québécoises accueillent des jeunes de milieux souvent fort différents. Certains d’entre eux arrivent au primaire avec des problèmes particuliers, notamment un déficit d’attention relié très souvent à la dépendance envers les médias sociaux. À ce chapitre, si les dirigeants du monde l’éducation souhaitent remettre l’attractivité de la carrière d’enseignant à l’avant-plan, ils devront offrir aux étudiants aspirant à une carrière dans l’enseignement un climat propice à leur aspiration, à savoir communiquer des connaissances aux élèves.

vigile.quebec tribune libre 19 août 2024
Le Devoir 22 août 2024 
 

La p’tite saucette de Legault

19 août 2024

Il aura fallu six jours après le passage des restes de la tempête Debby dans plusieurs régions du Québec pour que François Legault se rende à Louiseville, l’un des sites dévastés, pour y constater les dégâts.

Or sa visite de quelques heures s’est limitée à rencontrer les maires des diverses municipalités environnantes et à tenir un point de presse pour justifier le délai entre l’inondation et sa visite par le fait qu’il suivait «d’heure en heure» les développements des dégâts.

Mais là où le bât blesse avec le plus d’acuité réside dans le fait que le premier ministre a complètement ignoré les sinistrés, arguant qu’il faisait confiance aux maires et qu’ils étaient en mesure de lui faire un «bon résumé de la situation» dans leur municipalité respective. Une attitude cavalière exempte de toute forme d’empathie envers les sinistrés indigne d’un premier ministre responsable.

vigile.quebec tribune libre 19 août 2024

Le bilinguisme institutionnel, une utopie?

16 août 2024

En 1969, la première Loi sur les langues officielles fédérale est adoptée et les langues française et anglaise y sont déclarées comme étant les deux langues officielles du Canada. De ce fait, le Canada est donc considéré légalement comme un pays bilingue.

Or nonobstant l’adoption de la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, adoptée le 1er juin 2022, de nos jours, les francophones constituent environ 23% de la population canadienne. Conséquemment, le bilinguisme canadien constitue-t-il une utopie? En termes clairs, est-il pertinent de croire que le français au Québec, noyé dans une mer anglophone, réussira à maintenir son statut de langue officielle dans un Canada bilingue?

Dans ce contexte, qu’en est-il du Québec? Pour bien illustrer l’assimilation du français au profit de l’anglais, selon Statistique Canada, le français comme langue maternelle à Montréal est passé de 66.5% en 2001, à 63.3% en 2011 puis à 59.9% en 2021, soit un recul de 6.6% en 20 ans. Aujourd’hui, même à Québec, il est difficile d’être accueilli en français, voire même de se faire servir en français dans un restaurant. Sur un autre plan, malgré les efforts timides du gouvernement pour accorder une visibilité accrue du français sur les enseignes des commerces, le phénomène persiste sans coup férir.

Or l’histoire nous prouve qu’un pays bilingue arrive inévitablement à adopter la langue dominante et à reléguer la langue seconde à une infime portion de population qui assiste contre vents et marées à l’assimilation de sa langue. De surcroît, les Québécois sont réputés pour être de «bonnes gens» qui cherchent continuellement à éviter les tensions et à jeter les gants devant leurs opposants.

En terminant, je cède la parole à Stephen Harper, un ex-premier ministre canadien bilingue, qui déclarait un jour… en anglais que “The Canada is not a bilingual country. In fact it is less bilingual today than it has ever been”. Plutôt révélateur, non?

vigile.quebec tribune libre 15 août 2024

 

 

Nécessaire collaboration entre les parents et l’école

14 août 2024

Lors de mon passage à titre de directeur d’école, je me souviens d’une rencontre avec la mère d’un élève qui avait été suspendu de l’école pour possession de drogue, un fait qui conduisait à l’expulsion de l’école selon les règlements. Or j’avais décidé de passer outre à ce règlement moyennant la collaboration de la mère, ce que je lui exprimai au début de notre conversation. Toutefois, contre toute attente, la mère me répondit qu’elle préférait tirer un joint avec son fils le samedi soir plutôt que le laisser boire de l’alcool avec ses amis et devenir alcoolique comme son père. Devant ce refus de collaborer de la part de la mère, je n’ai eu d’autre choix que d’expulser l’élève.

En revanche, à l’occasion d’une autre rencontre avec la mère d’un élève, celle-ci me confia que les ponts étaient coupés entre elle son fils et qu’elle était dépourvue devant cette situation délicate. Nonobstant les sentiments de vulnérabilité de la mère, je lui conseillai de garder contact avec son fils. Or quelques années plus tard, lors d’une rencontre fortuite dans le corridor avec la mère, elle m’interpela pour me confier que mon conseil avait porté fruit et que la relation avec son fils s’était nettement améliorée.

Aujourd’hui, dans notre monde où les médias sociaux ont envahi l’univers des jeunes, la communication entre les parents et leur (s) enfant (s) est souvent court-circuitée, entraînant un vacuum néfaste, voire pernicieux entre eux. Cette dépendance aux médias sociaux se répercutent souvent en classe par un comportement distrait. Dans un tel cas, une communication assidue entre les parents et l’enseignant devrait être engagée et contribuer à créer la communication entre les parents et leur enfant. En termes clairs, les parents constituent une courroie essentielle avec les intervenants de l’école pour le plus grand bien du jeune.

vigile.quebec tribune libre 13 août 2024