On ne badine pas avec le bilinguisme

14 août 2023

En juin 2022, un groupe, dirigé par l’ex-professeur d’histoire Frédéric Bastien, décédé depuis lors, a déposé en Cour supérieure du Québec une requête pour obtenir un jugement visant à déclarer «nulle, invalide et inapplicable» la nomination de la gouverneure générale du Canada, Mary Simon, laquelle nomination va à l’encontre des dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés, qui prévoit que «le français et l’anglais sont les langues officielles du Canada».

Or, aujourd’hui, la juge Catherine Piché a statué que la Cour supérieure du Québec a tout à fait la compétence de se prononcer sur la validité de la nomination de la gouverneure générale. Contrairement aux arguments soulevés par les avocats d'Ottawa, la cause ne relève pas exclusivement de la Cour fédérale, a tranché la juge Piché, donnant ainsi raison aux instigateurs de la poursuite lancée pour obtenir la révocation de la représentante du roi Charles III au Canada.

Par ailleurs, nonobstant le fait que Mme Simon s’est engagée à apprendre le français lors de sa nomination, force est de constater que le chemin parcouru ne l’a pas encore menée très loin dans la connaissance de la langue de Molière jusqu’à maintenant. Conséquemment le groupe d’avocats de la poursuite aimerait voir la nomination de Mme Simon invalidée, et ont demandé à la Cour supérieure du Québec de se pencher sur le dossier.

De leur côté, pour justifier leur demande, les avocats du procureur général du Canada citaient entre autres l'article 18 de la Loi sur les Cours fédérales, qui prévoit que « la Cour fédérale a compétence exclusive (…) pour rendre un jugement déclaratoire contre tout office fédéral ».Or, selon la juge Piché, la gouverneure générale ne peut être considérée comme « un office fédéral », car elle a été nommée par la reine Élisabeth II et que la Couronne ne relève pas du gouvernement.

Les avocats du procureur général du Canada avaient 30 jours pour faire appel du jugement. Or, ils ne l'ont pas fait. En conséquence, la Cour supérieure du Québec dispose de toute la latitude pour révéler au grand jour qu’au Canada, on ne badine pas avec le bilinguisme.

vigile.quebec tibune libre 13 août 2023

 

Enseignants non qualifiés demandés

13 août 2023

D’entrée de jeu, vous est-il déjà arrivé d’imaginer une offre d’emploi dans les médias autorisée par le Service de police ou le Service des incendies de telle municipalité recherchant des policiers ou des pompiers non-qualifiés. Une hypothèse tout à fait inimaginable, l’engagement de tels candidats mettraient sérieusement en danger la sécurité des citoyens.

Eh bien, il faut croire que le monde de l’enseignement n’a que faire des qualifications légales des futurs enseignants puisque des conseils de services scolaires (CSS) sont prêts à engager du personnel enseignant ne possédant pas les qualifications requises. Et là où le bât blesse de façon scandaleuse, très peu de voix se sont élevées pour dénoncer les conséquences désastreuses sur la qualité de l’enseignement auprès des élèves touchés par une telle décision dont le principal effet collatéral encourage le nivellement par le bas.

Des constats qui révèlent à quel point les CSS sont prêts à reléguer la profession d’enseignant à un métier qui peut être confié à n’importe qui possédant quelque lien avec l’emploi offert, et cela même si le candidat ne possède aucune formation en pédagogie. Et on se demande pourquoi le métier d’enseignant a perdu son attractivité d’antan lorsque l’enseignement était considéré par la société comme une «vocation».

À mon avis, la pénurie d’enseignants à laquelle nous faisons face est étroitement liée a une carence systémique d’attractivité chez les futurs enseignants qui assistent à des démissions en bloc en fin d’année scolaire quand ce n’est pas pendant l’année scolaire. Et cette nécessaire attractivité va ressurgir quand la lourdeur des tâches des enseignants, notamment la présence croissante des élèves à besoins particuliers, s’estompera grâce à l’intervention de personnels spécialisés.

Le Devoir 11 août 2023
vigile,net tribune libre 13 août 2023
 

Personnes âgées prises en otages

9 août 2023

Quoique l’hécatombe dans les CHSLD durant la pandémie ait suscité une kyrielle de recommandations et de rapports, il semble que le système de santé auprès des personnes âgées ne soit pas encore sorti des écueils qui le hantent depuis des décennies.

En dernière heure, on apprend qu’une résidente de 92 ans du CHSLD du Boisé Sainte-Thérèse, Mireille Éthier, est décédée tragiquement après avoir chuté et s’être étouffée en mangeant. Selon sa belle-fille, indignée et bouleversée, Mme Éthier serait morte «par négligence du gouvernement. Des soins humains, elle n’en a pas eu».

Le scénario de la maltraitance envers les personnes âgées se répète inlassablement tel un vieux microsillon 78 tours usé et grinchant. Une ritournelle sans fin marquée par un destin implacable. Des cas comme celui de Mme Éthier sont devenus presque «normaux» comme si la mort qui survient à un âge avancé faisait partie de la vie «normale».

Jusqu’à quand notre société dite «civilisée» traitera-t-elle ses aînés comme des êtres de classe inférieure? Quand reconnaîtra-t-elle enfin le legs incommensurable de ces personnes qui ont contribué à la sueur de leur front au confort de notre société?

Notre société se doit de redonner à la vieillesse ses lettres de noblesse et de prendre soin de ceux et celles qui ont eu le privilège de vieillir au lieu de les tenir en otages dans un système qui semble avoir oublié qu’il est imputable de leur mieux-être en fin de vie.

vigile.quebec tribune libre 8 août 2023
Le Devoir 12 août 2023

Visa le noir, tua le blanc

9 août 2023

La loi 40 du gouvernement Legault, qui abolit les Commissions scolaires pour les remplacer par des Centres de services scolaires abolissant au passage les élections servant à élire ceux qui y siégeaient. a subi un échec en Cour supérieure à la suite d’une poursuite de la part de l’Association des commissions scolaires anglophones du Québec (ACSAQ), le juge statuant que certains articles de la loi vont à l’encontre des droits et libertés des anglophones.

«Sur les gros points, c’est une victoire éclatante. Ce jugement vient mettre un frein à cette nouvelle tendance de tout centraliser, que toutes les décisions soient prises par le gouvernement à Québec», argue Russell Copeman, directeur général de l’ACSAQ). «Ça vient confirmer les droits des Québécois anglophones de gérer et contrôler notre système d’éducation», se réjouit M. Copeman.

Le plus aberrant dans toute cette saga, ce n’est pas le fait que les anglophones aient eu gain de cause, mais plutôt le fait que les Centres de services scolaires francophones se retrouvent pris dans un carcan qui laisse toute la place à la centralisation des pouvoirs entre les mains du ministre de l’Éducation. Et de surcroît, cette loi permettrait notamment au ministre de nommer les futurs directeurs généraux des Centres de services scolaires, mais aussi de les limoger et même d’annuler une de leurs décisions pour imposer la sienne.

En termes clairs, le gouvernement Legault, via la loi 40, avait pour objectif notamment d’exercer un meilleur contrôle sur la gestion des Commissions scolaires anglophones alors que le jugement de la Cour supérieure remet le pouvoir entre leurs mains. Par ailleurs, la loi 40 s’appliquant aux Centres de services scolaires francophones, ces derniers verront leur autonomie s’estomper dans le processus de centralisation tel que formulé dans la loi.

vigile.quebec tribune libre 8 août 2023
Le Devoir (version abrégée) 16 août 2023

La modération n’a pas toujours meilleur goût

2 août 2023

Depuis plusieurs années, les résultats des élèves aux épreuves du MEQ subissent un tripotage en lien avec la modération statistique lors des épreuves ministérielles, une politique qui conduit souvent à des résultats carrément paradoxaux.

À titre d’exemples, une école secondaire se retrouve cette année avec plusieurs élèves en échec, surtout en histoire de quatrième secondaire, alors que ces jeunes avaient obtenu de bonnes notes pendant l’année scolaire. Et pourtant, les épreuves ministérielles ne valent que 20% de la note finale de l’élève depuis l’an dernier. Une jeune fille a même échoué en histoire de quatrième secondaire malgré une note de 81% durant l’année scolaire. Un élève qui avait obtenu une note-école de 73% en mathématique s’est retrouvé en échec après son examen ministériel, même si celui-ci ne valait que pour 20% de la note finale.

La situation s’explique par la modération des notes, un processus du ministère de l’Éducation qui vise à éviter les «notes bonbons» ou les évaluations trop sévères. Si plusieurs jeunes d’un même groupe obtiennent des résultats à l’examen ministériel beaucoup plus bas que la note accordée par leur enseignant pendant l’année scolaire, celle-ci sera revue à la baisse. L’inverse est aussi vrai.

Devant des cas d’injustices aussi criants, et considérant le professionnalisme des enseignants eu égard à la note de l’élève, je suis d’avis que toute forme de tripotages de notes par le MEQ enrobés dans une démarche de modération n’a tout simplement pas sa place dans le système d’évaluation des examens du MEQ. En termes clairs, l’élève doit recevoir la note à laquelle il a droit…point final.

vigile.quebec tribune libre 1er août 2023
Le Soleil (version numérique) 13 août 2023

 

Mme Chantal (suite)

30 juillet 2023

En guise de rappel, une enseignante du primaire, surnommée «Mme Chantal», a été prise en flagrant délit de voie de fait et d’intimidation envers ses élèves. Il appartient maintenant au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) de déterminer si les preuves sont suffisantes pour porter des accusations au criminel.

À l’origine de cette histoire scandaleuse, rappelons que le parent d’un jeune garçon qui revenait de l’école en pleurs a décidé au printemps dernier de placer un enregistreur dans le sac de son enfant. Obtenu par les médias, l’enregistrement permet d’entendre clairement l’enseignante qui hurle sur les élèves de sa classe de première année primaire de l’école des Grands-Vents, à Sainte-Marthe-sur-le-Lac, dans les Laurentides. «Toi, écrase! Ton comportement m’énerve! Pis toi, aussi! J’en peux pus!», peut-on l’entendre crier sur l’enregistrement. Depuis lors, l’enseignante a été suspendue.

À mon avis, il m’apparaît évident que Mme Chantal a dépassé outrageusement les bornes de l’autorité qu’une enseignante ou un enseignant peut exercer auprès de ses élèves en vidant son fiel méprisable sur des jeunes vulnérables de première année du primaire dont la plupart sont sûrement demeurés marqués psychologiquement par le vocabulaire acrimonieux de l’enseignante.

Conséquemment, Mme Chantal doit répondre des accusations portées contre elles au criminel… C’est une simple question d’abdication des règles élémentaires de déontologie attachées à sa fonction d’enseignante.

vigile.quebectribune libre 27 juillet 2023

Parité chez Québec solidaire

30 juillet 2023

C’est bien connu, depuis sa création, Québec solidaire (QS) a toujours aspirer à présenter une parité de sexe entre les divers candidats se présentant à une élection générale au Québec. Ce n’est donc pas surprenant si QS occupe les manchettes par les temps qui courent suite au départ de la députée caquiste de Jean-Talon, Joëlle Boutin, entraînant de facto la tenue d’une élection partielle dans le comté de la Capitale nationale.

Dans cette foulée, Ruba Ghazal, candidate pour succéder à Manon Massé, propose rien de moins de réserver 100% des nouvelles circonscriptions gagnables pour des candidatures féminines lors des prochaines élections générales. Bref, elle souhaite que «toutes les nouvelles circonscriptions où on a des chances de gagner soient représentées par des femmes». Enfin, «Un caucus qui n’est pas paritaire, ce n’est pas démocratique, puisqu’il représente mal la société», fait valoir Mme Ghazal.

Personne n’est contre la vertu. Toutefois, je suis plutôt d’avis que les électeurs de Jean-Talon choisiront le ou la candidate ayant les meilleures compétences pour les représenter, et ce, indépendamment du fait que ce soit un homme ou une femme. Conséquemment, QS donne un grand coup d’épée dans l’eau en investissant autant d’énergie dans l’atteinte de la parité au sein du caucus du parti.

Pourtant, de nombreux dossiers sont bloqués chez les membre de QS, dont celui de son option souverainiste, un dossier qui est traité avec prudence et qui aurait nettement plus d’impact sur la scène politique québécoise que la parité… En attendant, peut-être serait-il pertinent de se rappeler la phrase mémorable de l’ex co-chef de QS, Amir Khadir, «L’indépendance si nécessaire mas pas nécessairement l’indépendance».

vigile.quebec tribune libre 27 juillet 2023

Importance de l’appui des parents aux règles de conduite de l’école

26 juillet 2023

J’ai hésité longuement avant de faire parvenir cette lettre aux médias, notamment parce que toute forme de globalisation sur un sujet précis risque de susciter des injustices. C’est pourquoi, je désire faire amande honorable à l’avance auprès des parents qui pourraient être outrés, à raison, eu égard à mes propos en lien avec le sujet abordé dans cette lettre.

On remarque, depuis quelques décennies, que certains jeunes, lorsqu’ils arrivent à l’école, présentent des comportements inadmissibles, voire provocateurs, tels du vandalisme, des menaces auprès d’élèves vulnérables, des agressions physiques et psychologiques, etc… Pendant les cours, des élèves dérangent continuellement le professeur qui doit cesser son cours pour intervenir auprès des jeunes en question, et par conséquent pénaliser les autres élèves.

C’est une vérité de La Palisse, l’éducation d’un enfant se doit de commencer à la maison. Toutefois, certains parents, pour des raisons que je respecte, disposent de peu de temps pour éduquer leur enfant à de sains comportements élémentaires, souvent débordés par un emploi du temps surchargé. Conséquemment, les jeunes sont constamment ballottés entre deux mondes qui leur ouvrent une fenêtre sur les méandres de la manipulation.

Dans ces circonstances, l’appui des parents aux règles de conduite de l’école m’apparaît essentiel, voire crucial, à défaut de quoi l’école risque de s’éloigner de plus en plus de sa mission première, à savoir communiquer des connaissances à des apprenants, en suppléant au rôle des parents eu égard à l’éducation de base de leur (s) enfant (s).

vigile.quec tribune libre 25 juillet 2023

Effets collatéraux de la démission de Joëlle Boutin

26 juillet 2023

La démission de Joëlle Boutin de son poste de députée caquiste du comté de Jean-Talon dans la Capitale nationale a fait couler beaucoup d’encre ces derniers jours. Tous les scénarios ont été passés au crible par les journalistes couvrant la politique québécoise.

D’abord, les raisons de sa démission seulement neuf mois après le début de son mandat, à savoir des raisons familiales, très souvent servies dans des cas de départs hâtifs et fréquemment peu crédibles aux yeux des électeurs. Ensuite, une offre d’emploi au privé qu’elle ne pouvait pas refuser. En toile de fond, il est plausible de se demander si le fait de ne pas avoir été nommée ministre avec un CV relativement bien garni n’a pas influencé le départ de la députée de 43 ans en quête de nouveaux défis.

En ce qui a trait aux effets collatéraux de cette démission, on peu citer la facture de 600 000 $ provenant des poches des contribuables couvrant les frais d’une élection partielle. Du côté des électeurs, compte tenu que Mme Boutin débute son nouvel emploi en août, les électeurs de Jean-Talon risquent de se retrouver orphelins pendant une longue période puisque le premier ministre a six mois pour fixer la date de l’élection partielle.

Toutefois, là où le bât blesse profondément, c’est eu égard au contrat tacite de 4 ans que la députée s’était engagée à respecter auprès de ses électeurs, hormis des raisons de forces majeure qui auraient pu l’obliger à quitter ses fonctions. Être député exige une fidélité sans reproche envers ses électeurs et ce, pour toute la durée de son mandat. Être député incarne l’essence même de la démocratie, la pierre angulaire où converge la vie quotidienne des électeurs du comté. Le député est la voie de transmission entre les besoins du comté et le conseil des ministres.

En termes clairs, Joëlle Boutin a opté pour son plan de carrière, faisant fi des responsabilités auxquelles elle s’était engagée en devenant députée… Conséquemment, elle devra surmonter une kyrielle d’obstacles si, un jour, elle aspire réintégrer la vie politique!

vigile.quebec tribune libre 25 juillet 2023
Le Devoir (version abrégée) 27 juillet 2023
Le Soleil 29 juillet 2023
 

Le vouvoiement n’est pas la panacée

20 juillet 2023

Permettez-moi de profiter de la pause des vacances estivales pour aborder un sujet qui a suscité et qui suscite encore aujourd’hui de nombreux débats, à savoir le vouvoiement envers le personnel scolaire.

Le vouvoiement a toujours été associé à une marque de respect envers la personne à qui on s’adresse, une assertion à laquelle je me rallie mais avec une certaine réserve. Je m’explique. Tout d’abord, il m’apparaît primordial de faire une mise au point. À mes yeux, le respect ne s’impose pas par des «vous», il se gagne avec le temps. En termes clairs, l’enseignant gagnera le respect de ses élèves s’il les respecte. Et, dans un tel contexte, le tutoiement peut être utilisé au lieu du vouvoiement sans problème. Par ailleurs, il est utopique de croire qu’un prof qui exige le vouvoiement gagnera de facto le respect de ses élèves.

En ce qui me concerne, du temps où j’enseignais, je mettais les choses au clair dès le premier cours de l’année scolaire. J’avertissais mes élèves qu’ils pouvaient me tutoyer ou me vouvoyer mais qu’il devait me démontrer le même respect que je leur vouais. Et, en général, la proportion oscillait entre 50% de tutoiement et 50% de vouvoiement…et cela, dans un climat respectueux de chacun de mes élèves envers moi.

quebechebdo tribune libre 20 juillet 2023
Le Soleil (version numérique) 26 juillet 2023