Peut-on isoler l’homme de son oeuvre?
Tandis que son long-métrage J’accuse, qui relate les circonstances ayant entouré l’affaire Dreyfus, sortait le 13 novembre 2019 sur les écrans en France, le réalisateur franco-polonais était accusé à plusieurs reprises d’agressions sexuelles. Condamné pour détournements de mineurs en 1977, Roman Polanski est toujours poursuivi pour viol devant les tribunaux californiens.
Or, lors de la Mostra de Venise, J’accuse a remporté le Grand Prix du Jury et, depuis sa sortie en salles, le film a su attirer les spectateurs en faisant fi des manifestations et scandales entourant son auteur. En trois semaines, le long-métrage a atteint le million d’entrées en France et cela, malgré la polémique acerbe menée par des mouvements féministes issus de #MeToo.
Si l’on suit l’argumentaire des anti-Polanski, peut-on encore écouter la musique de Michael Jackson ou de Bertrand Cantat? Doit-on toujours aller voir les films de Woody Allen? En termes clairs, peut-on isoler l’homme de son œuvre artistique? Peut-on laisser le cinéphile décider du choix des films qu’il désire voir, notamment la mise sur écran d’une histoire qui a marqué l’imaginaire français.
Au Québec, certains distributeurs se sont déjà manifestés contre la présentation du film J’accuse dans leurs salles de cinéma, arguant, notamment, la non-acceptabilité sociale et le respect envers le mouvement #MeToo. À mon avis, J’accuse doit avoir son ticket d’entrée dans les salles de cinéma québécoises, si ce n’est tout au moins par égard pour les cinéphiles.
quebechebdo 3 mars 2020