Appel à la majorité silencieuse
Depuis le dépôt du projet de loi 60 et bien avant, les commentaires ont fusé de toutes parts sur ses tenants et aboutissants, autant du côté des avantages que des inconvénients. À la veille des consultations sur le projet de charte de la laïcité du gouvernement, nous serions donc portés à penser que la table est mise pour le débat officiel.
Toutefois, à mon sens, à part quelques opinions émises dans les courriers des lecteurs, ce sont les bonzes habituels des débats publics, tels les Parizeau, Landry et Bouchard qui ont occupé une grande partie de l’actualité médiatique.
À ceux-là s’ajoutent les partis politiques, tels le PLQ qui s’oppose catégoriquement au projet de charte, Québec solidaire qui s’enfonce de plus en plus dans un bourbier malsain, et la CAQ qui invite le PQ à mettre un peu d’eau dans son vin.
D’autres organismes et individus viendront certes s’ajouter avec les consultations qui s’amorceront le 14 janvier et nul doute qu’ils contribueront à enrichir le débat. Toutefois, comme à tout coup lors de ces débats, que retiendrons-nous de cette « majorité silencieuse » qui ne participera pas à ces échanges ?
Je pense ici autant aux Québécois de souche qu’aux immigrants qui se sont montrés cois depuis le début des débats sur le projet de loi 60. Et, parmi ces voix muettes, en particulier aux femmes musulmanes employées de l’État touchées par l’interdiction de porter des signes religieux ostentatoires en milieu de travail.
À plusieurs occasions au cours des derniers mois est ressorti le port du foulard par les femmes musulmanes, la plupart de celles-ci alléguant que cette coutume émanait de leur religion. Toutefois, à l’occasion, quelques voix prétendaient que le voile incarnait un objet de soumission face à la « supériorité » de l’homme sur la femme.
Qu’en est-il réellement de cette prétention ? Pouvons-nous espérer qu’une telle ignominie, si elle s’avérait fondée, fasse surface au cours des débats de la part de cette majorité silencieuse ? Et sinon, devrons-nous nous résigner à entendre les mêmes argumentaires qui nous sont servis sur la place publique depuis des mois ?
Si tel était le cas, j’ai l’impression que les consultations risquent de tourner en rond et qu’elles aboutiront au point de départ, à savoir la confrontation entre les pro et les anti-charte.
Voilà pourquoi j’ose espérer que cette démarche, qui se veut démocratique de la part du ministre Drainville, accueillera devant les élus d’autres voix que celles que nous avons entendues depuis des mois pour le plus grand bien d’une saine démocratie…à défaut de quoi l’exercice aura été malheureusement vain !
vigile.net tribune libre 13 janvier 2014
quebechebdo 13 janvier 2014