Maltais dans l’eau bouillante

Le 2 mars dernier, je publiais sur cette tribune un article intitulé « Une autre promesse du PQ balayée par en arrière » dans lequel je qualifiais les mesures proposées par Agnès Maltais à l’aide sociale de « pilule dorée » en « adoptant la stratégie de donner d’une main parcimonieusement à quelques assistés-sociaux qui auront la chance de se trouver un emploi, tout en amputant de 20% les prestations de la majorité des assistés-sociaux qui demeureront sans emploi ».

Cette fois-ci, c’est au tour de la Commission des droits et libertés de la personne, responsable de la promotion et du respect de la Charte des droits et libertés, d’y aller d’une charge à fond de train contre les mesures proposées par la ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale en les qualifiant même de « rétrogrades » en vertu des pactes internationaux auxquels le Québec a adhéré, au point de demander au gouvernement de surseoir aux trois principales recommandations proposées, lesquelles sont au centre des manifestations actuelles et contraires à plusieurs articles de la Charte des droits.

De l’avis de la Commission, « les mesures proposées par le projet de règlement affecteraient les personnes qui sont parmi les plus pauvres de la société et qui ne disposent pas de ce revenu décent susceptible de garantir l’exercice des droits et libertés », ce qui bafoue certains droits fondamentaux tels que, le droit à la vie, à la sûreté et à l’intégrité physique et psychologique (article 1), le droit au respect de la dignité (article 4), le droit d’un enfant à la sécurité, l’attention et la protection (article 39) et le droit à un niveau de vie décent (article 45).

Les dispositions visées par la Commission sont l’abolition du versement automatique d’un supplément de 129 $ par mois pour les personnes de plus de 55 ans, et de 129 $ ou de 221 $ par mois pour les familles ayant à charge un enfant de moins de cinq ans, ces deux situations causant des « contraintes temporaires à l’emploi », la disparition de ces allocations ayant pour effet de placer les ménages visés dans une situation de pauvreté entraînant la violation de la Charte, plaide la Commission qui ajoute que le fait de cibler les familles biparentales avec enfant à charge, tout en préservant les familles monoparentales, sous-entend un motif de discrimination interdite au sens de l’article 10 de la Charte, à savoir le droit à l’égalité. En conséquence, estime la Commission, les dispositions d’une loi ou d’un règlement « qui contreviennent à l’article 10 de la Charte devraient donc être jugées inapplicables en droit ».

En ce qui a trait à la ministre, elle a réagi en disant recevoir l’avis de la Commission, ajoutant qu’il sera analysé « en collaboration avec les avocats du ministère de la Justice responsables du droit public » tout en réaffirmant les objectifs de son projet à savoir de « favoriser la participation au marché du travail ».

À la lumière de ces nouvelles informations provenant de la Commission des droits et libertés, j’ai l’impression que Mme Maltais se trouve plongée dans l’eau bouillante d’une marmite qui annonce une saga judiciaire qui risque d’être longue. En ce qui me concerne, je souhaite que les conclusions aboutissent à un règlement qui respecte les droits fondamentaux reconnus par la Charte des droits et libertés à tous les citoyens du Québec, sans aucune discrimination.

vigile.net tribune libre 4 avril 2013
quebechebdo 5 avril 2013 "Agnès Maltais dans l'eau bouillante"

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