Une époque révolue
Les familles des militaires demandent de conserver leur libre choix scolaire dans le cadre du projet de loi 14, plusieurs d'entre elles craignant pour l'avenir de leurs enfants le jour où ils seront mutés hors du Québec, d’autant plus que les intéressés connaîtront leur nouvelle affectation d'ici deux semaines, un calendrier serré qui contribue sans doute à exacerber les sentiments de crainte devant l'inconnu.
Quant à la Défense nationale, elle ne fait rien pour atténuer les appréhensions des familles en cause en manifestant un certain malaise devant l'action de ces parents francophones, en refusant, entre autres, de s’ingérer dans le débat linguistique québécois [une attitude de « je m’en lave les mains »], alléguant habilement que ce sont les parents qui détiennent la responsabilité de l’éducation de leurs enfants.
À titre de rappel, ce privilège avait été accordé par René Lévesque et Camille Laurin en 1977, les auteurs de la loi 101 reconnaissant, de façon « politically correct », les devoirs des militaires et les sacrifices imposés à leur famille.
À mon sens, cette époque est révolue. Rappelons d’abord que la Charte des droits de Pierre Elliott Trudeau a contraint les provinces à offrir l'éducation en français partout où le nombre le justifie, une obligation confirmée plus tard par la Cour suprême. Sur les 25 bases de l'armée, de la marine et de l'aviation que compte le pays, 24 disposent maintenant d'un enseignement en français, généralement jusqu'à la fin du secondaire.
Le régime d'avantages sociaux de la Défense nationale prévoit même une indemnité d'études, s'ils doivent envoyer leurs enfants étudier dans une autre localité, et ce, jusqu'à la fin du secondaire. Les militaires reçoivent même l'appui de leur employeur. Chaque famille reçoit avec son avis de déplacement un dossier d'accompagnement donnant les coordonnées des écoles françaises à proximité de sa résidence, lesquelles sont facilement accessibles sur le site Navigateur familial des Forces armées.
En réalité, face à un tel progrès dans les services offerts à ces familles contestataires, l'attitude de certains parents d'ici envoie un très mauvais message aux communautés francophones hors Québec qui se sont battues bec et ongles pour obtenir leurs écoles. Un minimum de respect envers elles s’impose. Qu’y-a-t-il de plus insultant, pour elles, que de voir des Québécois francophones leur passer sous le nez, dans un autobus scolaire, pour se rendre dans une école anglaise alors que la survie de ces communautés dépend très souvent des nouveaux arrivants?
En fait, si le gouvernement accepte l'exception militaire, n’y-a-t-il pas danger de l'étendre aux autres francophones qui seraient appelés à travailler un jour hors du Québec dans quelque profession que ce soit? Il appartient maintenant à nos politiciens de rappeler à TOUS les résidents québécois qu’ils doivent accepter les conséquences de vivre dans un État où le français est la langue officielle.
quebechebdo 16 mars 2013
vigile.net tribune libre 16 mars 2013