La défense du français, une compétence provinciale
Au même moment où le projet de loi 96, loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, est étudié en commission parlementaire à Québec, la ministre canadienne des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor a déposé son projet de loi pour «moderniser» celle sur les langues officielles adoptée en 1969.
Une lecture approfondie du projet de loi fédérale nous permet de constater que l’extension de la loi 101 aux fonctionnaires fédéraux et à toutes les entreprises œuvrant sur le territoire québécois n’apparaît nulle part. Devant cet état de fait, la ministre responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne, Sonia Lebel, n’a pas manqué de ramener Ottawa à l’ordre en sommant la ministre Petitpas Taylor de laisser le Québec gérer la défense du français sur son territoire. «Ne vous mêlez pas de nos compétences. Sur le territoire du Québec, bas les pattes. On est capables de s’occuper de notre français et on va s’occuper de la minorité anglophone correctement, dans les règles et dans le respect de leurs droits. Alors, on n’a pas besoin de vous», a lancé Sonia Lebel à l’intention du gouvernement fédéral.
Par ailleurs, la nouvelle mouture présentée par Ginette Petitpas Taylor constitue un «recul marqué» par rapport à la version présentée par sa prédécesseure Mélanie Joly en juin 2021. À titre d’exemple, le projet de loi présenté par Mme Joly, mort au feuilleton avec les élections, reconnaissait «l’asymétrie» entre les situations du français et de l’anglais au Canada, une notion disparue du projet de loi de Mme Petitpas Taylor. D’ailleurs, la volte-face du fédéral, à quelques mois d’intervalle, soulève des questions à Québec voulant que le projet de loi de Mélanie Joly n’était pas simplement électoraliste pour aller chercher l’appui des minorités francophones hors Québec.
Enfin, sur plusieurs aspects, le projet de loi du fédéral sur les langues officielles enfreint le projet de loi 96 de Québec. Il est à souhaiter que si la pièce législative d’Ottawa est adoptée, Québec intente des recours juridiques.
Le Soleil 19 mars 2022